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« Le Prix » : Une Confrontation Brûlante de Vérité et d’Humanité

Photo du rédacteur: Bonfils Frédéric Bonfils Frédéric

Dernière mise à jour : 14 févr.


Dans Le Prix, mis en scène par Tristan Petitgirard, Cyril Gely nous plonge dans un huis clos tendu entre Otto Hahn, chimiste allemand honoré du prix Nobel de chimie en 1946, et Lise Meitner, son ancienne collaboratrice injustement écartée des honneurs. Ce face-à-face, porté par Pierre Arditi et Ludmila Mikaël, résonne avec une force rare, oscillant entre l’intime et l’historique, la colère et la douleur, l’ombre et la lumière.


Une joute oratoire magistrale


La pièce s’ouvre dans la suite d’un hôtel de Stockholm, quelques heures avant la remise du prix. Otto Hahn attend, seul, avant que ne surgisse Lise Meitner, comme un fantôme venu hanter ses certitudes. Ce décor confiné devient un ring où s’affrontent deux êtres liés par des décennies de travail commun et par une blessure béante : l’effacement de Meitner au profit d’Hahn.


Les dialogues fusent, incisifs, entre reproches amers et justifications vacillantes. Otto Hahn est-il un traître ou une victime des circonstances ? Lise Meitner cherche-t-elle réparation ou simplement la vérité ? Il n’y a pas de réponse simple, et c’est toute la force de la pièce. La dramaturgie de Cyril Gely évite le piège du manichéisme, préférant mettre en lumière la complexité des rapports humains et des compromis imposés par l’Histoire.


Des interprètes à couper le souffle


Si Le Prix est une pièce de texte et d’idées, son intensité repose avant tout sur l’incarnation magistrale de ses deux protagonistes. Pierre Arditi, en Otto Hahn, compose un personnage tiraillé entre honneur et remords. Il oscille entre arrogance et fragilité, sûr de son mérite mais incapable d’affronter pleinement ses responsabilités. Son jeu tout en retenue contraste avec la puissance émotionnelle de Ludmila Mikaël, qui livre une Lise Meitner bouleversante, à la fois dignifiée par la colère et brisée par l’injustice.


Sa présence scénique est fascinante. Elle ne crie jamais, mais sa voix, son regard, son silence même, brûlent de rage contenue. Elle incarne ces figures féminines trop longtemps invisibilisées, qui portent en elles à la fois l’éclat du génie et le poids du mépris.


Une mise en scène sobre et lumineuse


Tristan Petitgirard choisit une mise en scène épurée, fidèle à la sobriété du texte. La lumière joue un rôle essentiel, traduisant l’évolution de la confrontation : froide et crépusculaire au départ, elle s’intensifie au fil du dialogue, jusqu’à plonger les personnages dans un clair-obscur saisissant, métaphore de la vérité qui se fissure.


La musique, elle aussi, accompagne subtilement le récit. Le choix de la Mélodie Hongroise de Schubert, réarrangée par Romain Trouillet, résonne comme un écho du passé, un vestige de la complicité entre Otto et Lise, une tendresse enfouie sous les décombres de l’histoire.


Une résonance contemporaine


Si l’action se situe en 1946, le sujet demeure terriblement actuel. La question de la reconnaissance des femmes scientifiques, longtemps reléguées à l’ombre de leurs collègues masculins, continue d’alimenter les débats. Mais Le Prix ne se limite pas à une dénonciation féministe : il interroge aussi la responsabilité morale face aux compromissions du pouvoir, le prix de la réussite et la solitude des vainqueurs.


 

Un duel mémorable, une pièce essentielle


Avec Le Prix, Cyril Gely signe une œuvre élégante et percutante, portée par une interprétation d’une rare intensité. Ludmila Mikaël et Pierre Arditi offrent un moment de théâtre exceptionnel, où le temps semble suspendu, où les mots frappent avec la violence d’une gifle et la délicatesse d’une caresse. Un spectacle d’une grande intelligence, à la fois sobre et bouleversant, qui résonne longtemps après la tombée du rideau. Avis de Foudart 🅵🅵🅵🅵



 


LE PRIX

Une pièce de Cyril Gely 

Mise en scène Tristan Petitgirard 

Avec Pierre Arditi, Ludmila Mikael, Clara Borras et Emmanuel Gaury 

Assistante mise en scène Léa Moussy • Décor Juliette Azzopardi et Jean-Benoit Thibaud • Costumes Virginie H • Lumières Denis Schlepp • Musique Romain Trouillet • Vidéo Mathias Delfau

Crédit Photos Bernard Richebé



THÉÂTRE HÉBERTOT

Du 06/02/2025 au 30/03/2025 • Du mercredi au samedi à 21h, le dimanche à 16h • Durée : 1h40





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