Le Mystère Ophélia : dans les eaux troubles d’un chef-d’œuvre
- Bonfils Frédéric
- il y a 4 jours
- 2 min de lecture
Et si la plus célèbre noyée de l’histoire de l’art n’était pas qu’un personnage de fiction ?
Derrière Ophelia de Millais, tableau culte du romantisme britannique, il y a un visage, un corps, une vie. Celle de Lizzie Siddal, muse sublime, artiste effacée, femme oubliée. Avec Le Mystère Ophélia, Céline Devalan lui redonne voix, chair et rage dans un spectacle aussi envoûtant que troublant.
Une enquête au cœur du mythe
La pièce s’ouvre comme une confession : celle d’une metteuse en scène tombée amoureuse d’un tableau. Puis, très vite, on glisse dans les coulisses du Londres préraphaélite, où Lizzie Siddal, modeste chapelière, devient muse de Rossetti, puis modèle d’Ophélie. À la frontière entre fiction et réalité, le spectacle explore les échos sinistres entre le destin de la muse et celui de l’héroïne shakespearienne. L’une s’est noyée sur scène, l’autre dans la vraie vie.
Un théâtre-caméra obscura
C’est toute la force de cette création : mêler théâtre, peinture, projections vidéo, poésie et fragments filmés pour construire un dialogue entre les images et les corps, entre l’art et ce qu’il détruit. Sur scène, deux espaces : à l’avant, l’atelier du peintre ; à l’arrière, la déchéance de Lizzie. Entre les deux, un rideau de fils où s’impriment les toiles, les souvenirs, les fantômes.
Céline Devalan est Lizzie Siddal : fragile, intense, solaire. Romain Arnaud-Kneisky campe un Rossetti passionné et destructeur. Le duo est magnétique, et leur histoire, aussi toxique que romanesque.
Récit d’une effacée
Ce que ce spectacle révèle, au fond, c’est un piège. Celui dans lequel tombent tant de femmes artistes : être admirées sans jamais être entendues. Lizzie était peintre, poétesse, pionnière. On l’a figée en muse. On l’a enterrée avec les poèmes qu’elle avait écrits. On l’a exhumée pour mieux les publier. Le Mystère Ophélia rend justice à cette figure trop longtemps ensevelie sous la beauté de son propre portrait.
Pourquoi il faut y aller
Parce que c’est rare de voir une pièce aussi tendre, intelligente et sensorielle.
Parce qu’on y découvre une figure fascinante.
Parce que ça parle d’amour, de domination, d’images, de corps, de silences.
Et surtout, parce qu’on en ressort avec la sensation étrange et précieuse qu’un tableau peut changer une vie… ou la briser. Avis de Foud’art 🅵🅵🅵
Le Mystère Ophélia
Texte et mise en scène Céline Devalan
Avec Céline Devalan et Romain Arnaud-Kneisky
Lumières/vidéos Antoine Le Gallo
crédit photo Céline Sereyn
Vu lors de l’Avant-première au Théâtre du Lucernaire
Festival Off d’Avignon
Théâtre des Corps Saints
Du 5 au 26 juillet à 10h • Relâche le mardi • Durée 1h15


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