« Une impression de bonheur semblait planer dans l'air... »
Les années 70 ont un côté assez joyeux, excentrique, spontané et même enfantin. Les looks de David Bowie cohabitent avec le disco, les hippies et un certain sentiment de liberté, lié à une transformation sans précédent de la société. Mais tout n'était pas si rose et cette période a connu de fortes turbulences économiques et de grandes violences politiques et sociales.
« Le bonheur semble un art difficile car se mélangeant sans cesse aux aléas d’une vie »
Si le bonheur immédiat, issu des petites choses de la vie parait tout simple, il est aussi impossible à maintenir sur le long terme tant, au quotidien, il y a toujours quelque chose pour venir le ternir, l’abîmer.
Une époque particulièrement charnière
Pierre Maillet, comédien et metteur en scène, rend hommage au seventies et fait une variation sur le bonheur à travers l’œuvre de Rainer Werner Fassbinder, en adaptant au théâtre, trois de ses films, tous sortis en 1974 - 1975, mis bout à bout : Le droit du plus fort, Tous les autres s’appellent Ali, Maman Küsters s’en va au ciel.
Une belle occasion pour Pierre Maillet qui a déjà mis en scène, la plupart de ces pièces de théâtre de se confronter à son cinéma et d’aborder à nouveau, cette figure emblématiques du Nouveau Cinéma allemand - l’équivalent de la Nouvelle Vague française.
L’acteur et metteur en scène relie aujourd’hui trois scénarios du dramaturge et cinéaste, Fassbinder
Rassemblés dans un dispositif scénographique et narratif, le projet est certainement de mettre en exergue les préjugés qui minent la société.
Une quête pour le bonheur
Un prolétaire dans la bourgeoisie, une femme d’ouvrier parmi les politiques, un travailleur immigré dans une famille allemande.
Trois histoires, trois envies d’être humain de sortir de sa catégorie sociale et trois échecs.
L’enjeu est ici d’harmoniser les trois scénarios et de réinventer l’espace
Certes, avec ses nombreux plans fixes, son romantisme et ses espaces souvent confinés, les films de Fassbinder ont des liens très forts avec le théâtre, mais un des atouts majeurs du cinéma est le montage qui permet de passer très rapidement d’une émotion à une réaction et d’un espace à un autre. Pierre Maillet, en créant plusieurs espaces scéniques, à l’intérieur d’un même espace, par un jeu de rideau ingénieux et, en reliant chacune des histoires avec des petites touchent scénaristes lumineuses et un esprit « très cabaret », convenu, mais réussi, s’en sort plutôt bien.
Mais pourquoi mettre autant de distanciation avec ce génie mélancolique ?
Pourquoi passer du sulfureux au comique, du cynique au rire ?
Pourquoi expédier la dernière œuvre - Tous les autres s’appellent Ali (l’histoire, la plus passionnante, sans doute) ?
Il est vrai que ces œuvres datant de plus de 50 ans, ont un côté suranné, mais fallait-il vraiment tomber dans ce panneau et faire en sorte que, la plupart du temps, les 8 comédiens, à l’exception du magnétique Arthur Amard et de la sublime Marilú Marini, surjouent et tombent dans la caricature ?
Le cabaret des gens modestes
Avec Le Bonheur, il est évident que l’esprit de troupe, l’énergie des comédiens et les très bonnes idées de mise en scène, apportent un côté très plaisant à cette immense saga POP de la comédie humaine.
Mais ce cinéaste qui plaçait la critique sociale et politique au cœur de son travail, se démarquant ainsi du pur divertissement, ne méritait-il pas plus de profondeur et d’engagement ? Avis de Foudart 🅵🅵
LE BONHEUR (N’EST PAS TOUJOURS DRÔLE)
Le droit du plus fort, Maman Küsters s’en va au ciel, Tous les autres s’appellent Ali
Trois scénarios de Rainer Werner Fassbinder
Textes français Alban Lefranc
Adaptation Pierre Maillet et Fabien Spillmann
Mise en scène Pierre Maillet
Avec Arthur Amard, Valentin Clerc, Alicia Devidal, Luca Fiorello, Pierre Maillet, Marilu Marini, Thomas Nicolle Simon Terrenoire, Elsa Verdon, Rachid Zanouda
© photo Tristan Jeanne-Valès
THÉÂTRE LE MONFORT
3 > 11 juin 2022 à 19h30 dimanche et lundi à 16h Durée 3h30 avec entracte
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