Originaire du Moyen-Orient et résidant en Europe, Walid Mansour se rend en Argentine pour enquêter sur un spectacle mythique créé dans les années soixante par Simon Frank. Ce juif polonais y reconstituait sa vie à Varsovie avant la Seconde Guerre mondiale. En 1962, prétendant être un rescapé des camps de concentration, Simon Frank s'installe en Argentine. Sur son terrain, il reproduit un bout de Varsovie et convie les locaux à revivre son histoire. Mais en 2006, un rebondissement survient : on découvre que Frank était un imposteur.
Le renommé dramaturge argentin, Mariano Pensotti, connu pour ses jeux entre réalité et fiction, revisite cette histoire dans "La Obra". Il s'inspire de faits réels, comme l'immigration juive en Argentine et la présence post-guerre des nazis, pour forger une œuvre à la frontière du théâtre documentaire. "Je voulais créer une pièce qui balance entre réalité et fiction, utilisant les techniques du théâtre documentaire, pour mettre en lumière les cicatrices de la violence passée," déclare-t-il.
Dans "La Obra", Pensotti, intrigué par des non-acteurs incarnant une fiction - à l'instar des résidents de Nova Jerusalem au Brésil qui rejouent la Passion du Christ annuellement - souligne que son approche transcende la simple narration. Pour lui, l'histoire de Frank devient une métaphore de l'Argentine, avec ses secrets cachés, ses traumatismes et sa recherche identitaire. Il voit ce spectacle comme une réflexion de la réalité, suggérant que tout est mise en scène.
La mise en scène, co-créée avec Mariana Tirantte, va au-delà d'un simple fond de scène. Elle est un élément narratif, reprenant des fragments du décor initial de Simon Frank. "Avec Mariana, nous percevons la scénographie comme des dispositifs vivants qui racontent des histoires. Elle dépasse le purement esthétique pour mettre à jour ce qui est caché," explique Pensotti.
En dépit du succès de ses œuvres antérieures, comme "Los Años", Pensotti reconnaît les challenges du théâtre argentin. Néanmoins, il demeure positif, citant la volonté humaine de raconter ses expériences comme une force indomptable.
"La Obra" aspire à être un miroir du monde, dépeignant la vie comme un vaste drame théâtral. La pièce interroge la mémoire, la vérité, et le pouvoir de la fabrication. Elle sonde les limites entre réel et imaginaire, et pose une interrogation cruciale : Dans un monde saturé de représentations, comment différencier victimes et oppresseurs? Avis de Foudart 🅵🅵🅵🅵
La Obra
Texte et mise en scène Mariano Pensotti
Avec Rami Fadel Khalaf, Alejandra Flechner, Diego Velázquez, Susana Pampin, Horacio Acosta, Pablo Seijo • Musicien Julián Rodríguez Rona • Décor et costumes Mariana Tirantte • Musique Diego Vainer • Lumière David Seldes • Vidéo Martin Borini, José Jimenez • Crédit photo © Nurith Wagner Strauss
Théâtre de la Cité internationale (Paris)
Dans le cadre du Festival d’Automne à Paris
Du 23 au 26 Octobre 2023 • Les lundis et mardis à 20h • Les mercredis et jeudis à 19h • En espagnol surtitré en français • À partir de 14 ans • Durée 1h30
Le 31 octobre Festival Internacional de Teatro de Vitoria (Vitoria-Gasteiz, ES)
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