13 janv. 20233 min de lecture

L’orage

Dernière mise à jour : 14 janv. 2023

« Au cœur de la nuit, l’Aurore resplendit ! »

« Ils viennent d’ailleurs, d’une autre société, d’un autre monde, et pourtant, leur humanité est la nôtre, ils nous parlent » Alors que l’air du temps est rempli de morosité ambiante, Denis Podalydès nous donne rendez-vous avec D'Alexandre Ostrovski avec une pièce qui se concentre « sur toutes les formes de peur, de l’angoisse à la terreur ». Mais Ostrovski est aussi un grand auteur dramatique qui sait trouver de l’humour dans la tragédie et donner de l'humanité à chacun de ses personnages. Denis Podalydès nous a concocté un spectacle romantique entre tragédie et comédie « une petite histoire d'adultère provinciale qui pourrait être racontée par Flaubert ».

« La beauté de cette pièce tient surtout à la vie, la vie même qui éclaire et tourmente chacun des personnages, qu’ils soient du côté de l’inertie, de la débrouille, du relatif, comme du côté de l’idéal, de la liberté, de l’absolu. Chacun a peur, chacun cherche aussi, malgré tout, sa voie, son rachat. Chacun est en proie à sa propre faiblesse » Denis Podalydès

Nous sommes à Kalinov, une petite ville sur les bords de la Volga. Loin, très loin de l’effervescence intellectuelle et artistique de Moscou. Entre la rigidité des rapports sociaux, le poids de la religion, de l’inculture et de l’alcool, le conservatisme domine dans cette bourgade faites de marchands, de bourgeois et d'ouvriers.

« Pourquoi je me refuse ce que je désire plus que tout ? Je veux bien mourir pour avoir au moins une fois obéi à mon cœur ».

Alors qu’un orage s’approche, gronde et menace, Katerina, une jeune femme idéaliste, fervente, coincée entre un homme violent, veule et ivrogne et une belle mère tyrannique, étouffe. Boris, le jeune neveu du riche marchand Dikoï deviendra-t-il sont sauveur ? Lui permettra-t'elle de vivre un tant soit peu selon son désir profond ? ou sera-t-il à l’origine de sa perte ?

« Mais de quoi avez-vous peur, dites-le moi, dites-moi ! Le moindre brin d’herbe est en liesse, la fleur se réjouit… L’orage ne va pas nous tuer… il est béni comme tous les bienfaits du ciel ! » Autour de Kouliguine, poète, oracle, humaniste, philosophe, inventeur qui, au début de la pièce, nous offre un instant d’émerveillement, c’est tout une humanité contradictoire tragi-comique, faible et violente, mystérieuse et irrésolue qui s’offre à nous. Un monde de peur et d’enfermement matérialisé par la très belle scénographie d’Éric Ruf faites de hauts murs clos et de grondements d’orage.

« Ah ! Pauvre peuple qui ne voit qu’avec les yeux de la peur... moi je n’ai pas peur, voyez-vous, non… Au cœur de la nuit, l’Aurore resplendit !… Mais vous, vous restez saisis d’effroi à vous demander si c’est un présage de guerre ou de choléra !… Vous regardez la beauté comme un épouvantail. Ah ! Pauvre peuple qui ne voit qu’avec les yeux de la peur… moi je n’ai pas peur… ». Kouliguine

Du tonnerre, des chants de la sensualité et des drames

Avec une merveilleuse troupe de comédiens investis qui souffrent, aiment, chantent, ce riche texte, superbement adapté par Laurent Mauvignier est une ode à la liberté. Aussi beau qu’inventif, aussi ironique qu’émouvant. Avis de Foudart 🅵🅵🅵🅵

L’ORAGE

D'Alexandre Ostrovski

Adaptation Laurent Mauvignier

Mise en scène Denis Podalydès de la Comédie-Française

Avec Cécile Brune, Julien Campani, Philippe Duclos, Francis Leplay, Leslie Menu, Dominique Parent, Laurent Podalydès, Mélodie Richard, Nada Strancar, Bernard Vallery, Geert van Herwijnen, Thibault Vinçon

Crédit © Jean-Louis Fernandez

THÉÂTRE DES BOUFFES DU NORD

Du 12 au 29 janvier 2023

Du mardi au samedi à 20h • Matinées le dimanche à 16h • Durée du spectacle 2h30