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Colorature, Mrs Jenkins et son Pianiste : un sublime naufrage lyrique

Photo du rédacteur: Bonfils Frédéric Bonfils Frédéric

Une odyssée musicale entre éclats de rire et émotion


Il fallait oser ! Raconter l’histoire vraie d’une cantatrice incapable de chanter juste, et pourtant persuadée d’être une grande soprano colorature, est un pari risqué. Colorature, Mrs Jenkins et son Pianiste, adapté par Stéphane Laporte et mis en scène par Agnès Boury, relève ce défi avec brio. Plus qu’un simple pastiche, la pièce met en lumière un duo fascinant et nous plonge dans une comédie aussi irrésistiblement drôle qu’émouvante.


Florence Foster Jenkins : une icône du chant… approximatif


On pourrait se contenter de se moquer de Florence Foster Jenkins, cette riche héritière américaine qui, dans les années 1930-40, massacrera avec une ferveur inébranlable les plus grands airs d’opéra. Mais la magie de ce spectacle est de ne jamais tomber dans la caricature facile. Colorature ne se contente pas de railler les prouesses vocales improbables de la diva : il en dresse un portrait nuancé, mêlant autodérision, tendresse et une subtile réflexion sur l’aveuglement artistique.


Agnès Bove incarne cette figure hors norme avec un mélange de conviction et de naïveté désarmante. Son interprétation est d’une précision redoutable : il faut un talent immense pour chanter aussi faux avec une telle justesse ! Là où d’autres auraient pu verser dans l’exagération, elle trouve le ton parfait, oscillant entre assurance candide et fragilité touchante. On rit, bien sûr, mais on s’attache surtout à cette femme qui, coûte que coûte, s’accroche à son rêve.


Cosme McMoon : l’alter ego malheureux mais indispensable


Car une diva ne peut exister sans un pianiste, et en l’occurrence, c’est Cosme McMoon, son accompagnateur et complice malheureux, qui tient le cap dans ce naufrage lyrique. Interprété tour à tour par Cyril Romoli ou Grégori Baquet, ce personnage porte en lui toute l’ambiguïté de cette histoire. Fasciné, horrifié, impuissant, il tente tant bien que mal de sauver la musique, tout en restant fidèle à cette femme qui, malgré tout, l’émeut profondément. Son jeu, entre exaspération et affection, est un pur régal. Il est la clé qui nous empêche de rire trop cruellement de cette diva à contretemps.


Une mise en scène subtile et une écriture intelligente


Agnès Boury signe une mise en scène qui laisse respirer les personnages, évitant tout effet de lourdeur. Loin d’un simple enchaînement de morceaux chantés faux, la pièce raconte avant tout une histoire : celle d’un lien unique entre deux artistes improbables. Le texte de Stephen Temperley, brillamment adapté par Stéphane Laporte, est un bijou d’équilibre entre humour et émotion. Il aurait été facile de réduire Florence Foster Jenkins à une simple farce, mais Colorature en fait un personnage profondément humain.


Un final triomphal malgré tout


Le sommet de cette odyssée vocale reste, bien sûr, la reconstitution du fameux concert au Carnegie Hall. Alors que la salle est en liesse, Florence, elle, ne perçoit que l’adoration de son public. C’est peut-être là le plus grand mystère de cette femme : où s’arrête l’aveuglement, où commence la lucidité ? Le spectacle ne tranche pas, et c’est tant mieux. On ressort de la salle avec cette même interrogation et, surtout, avec une tendresse immense pour ce personnage.


 

Un triomphe mérité


On hurle de rire, certes, mais on est aussi ému. L’incroyable complicité entre les comédiens, la finesse de l’écriture et la délicatesse de la mise en scène font de Colorature une pièce exceptionnelle. Florence Foster Jenkins n’était sans doute pas une grande chanteuse, mais elle était une artiste à sa manière. Et plus de soixante-dix ans après sa disparition, elle continue d’enflammer le cœur du public, faux vibratos inclus.


Un spectacle à voir absolument ! Avis de Foudart 🅵🅵🅵



 


COLORATURE

Une pièce de Stephen TemperleyAdaptation Stéphane LaporteMise en Scène Agnès Boury

Avec Agnès Bove et Grégori Baquet ou Cyril Romoli et la participation de Eymeric François

Lumières Laurent Béal, Costumes Eymeric François, Décor Claude Plet

Photo Marie Dicharry, Paule Thomas


Théâtre Actuel la Bruyère

À partir du 25 janvier 2025 • Samedi à 15h,

dimanche et lundi à 19h30, mardi à 21h • Durée

1h20




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